The Notorious B.I.G : retour sur le classique "Ready To Die", 25 ans déjà

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The Notorious B.I.G : retour sur le classique "Ready To Die", 25 ans déjà

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The Notorious B.I.G le 29 juin 1995
The Notorious B.I.G le 29 juin 1995
© Getty - David Corio

Cette semaine marque l’anniversaire du premier album de Biggie Smalls. Un disque qui, encore aujourd’hui, reste une pierre angulaire du rap tel qu’on le connaît.

C’est le 13 septembre 1994 que sort un album qui allait tout changer : Ready To Die, d’un certain Christopher Wallace, alias Biggie Smalls, alias Notorious B.I.G. En 2019, ce chef d’œuvre demeure un incontournable tant il continue d’influencer les artistes. Seule une poignée d’albums peuvent se targuer d’avoir façonné le rap aussi durablement, et celui-ci en est un. Sur plusieurs points essentiels.

Le mythe d’écrire de tête

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Biggie est connu pour avoir été l’un des premiers à pondre des succès commerciaux sans passer par la case écriture ; ça fait partie de sa légende, il n’écrivait pas ses lyrics sur des feuilles de papier, mais les rappait directement. Comme toute légende qui se respecte, en réalité ce n’est pas tout à fait vrai. Sur cet album, il a enregistré la première partie des sessions de manière classique, avec des textes écrits. Ce n’est qu’à partir de la seconde moitié qu’il a utilisé la méthode de tête. Cela ne veut pas dire qu’il improvisait de A à Z, mais il avait tout mémorisé de tête et n’avait plus besoin de cahier. Cette particularité est presque devenue un modèle pour de nombreux rappeurs, certains étant plus crédibles que d’autres, au point que c’est devenu aujourd’hui un aspect assez banal tant ceux qui s’en vantent de ne pas avoir besoin d’écrire sont nombreux.

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La création d’un personnage

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Du premier au dernier morceau, le rappeur a un rôle et il s’y tient avec brio. Rien ne dépasse, il donne tout ce qu’il a pour plonger l’auditeur dans les rêves et les cauchemars d’un gangsta rappeur. Attention cependant, cela ne veut pas dire qu’il est "faux" ou qu’il ment. Au contraire, de nombreux analystes ont justement apprécié le côté presque documentaire que le bonhomme a su apporter dans certains textes. Simplement il a compris qu’apporter une dose de fiction qui fait appel à l’imagination de l’auditeur lui permet de toucher le plus grand nombre, quitte à dépasser le simple récit autobiographique pur. Là encore, c’est une évidence aujourd’hui. On pense à Rick Ross pour le côté cinématographique et fictionnel poussé à son paroxysme mais plus globalement, le fait de se mettre soi-même en scène à des degrés divers est pratiquement devenu la norme depuis.

Mouv' Live Club
1h 01

L’importance du producteur

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Biggie fait preuve d’un talent brut unique sur cet album, mais le rôle de Puff Daddy reste central. Concrètement B.I.G était à ce moment là de son histoire un jeune prodige de Brooklyn qui aurait livré un album bien différent s’il avait été livré à lui-même. La couleur aurait été différente, l’ambiance plus hardcore et le tout beaucoup plus énervé. Ainsi il n’était pas fan du morceau Juicy à la toute base. Puffy a imposé une direction artistique beaucoup plus ouverte aux singles, et les deux ont été gagnants au final. Le rappeur a fait un classique qui a parlé au grand public, et le producteur s’est placé (avec son label Bad Boy Records) comme une tête pensante du game.

Punchlineur

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Si Diddy a modelé Ready To Die avec des objectifs très pragmatiques en visant le top des charts, cela ne veut pas dire qu’il a cherché à gommer ce qu’était Biggie dès le départ : un rimeur hors-pair. Ready to die a ainsi un côté "meilleur des deux mondes" où au soin des prods et aux gros moyens en général répondent le flow aiguisé du natif de Brooklyn et surtout, son sens inné de la punchline. Sans tomber dans l’excès inverse (des couplets qui seraient juste des assemblages de phrases-choc), Notorious B.I.G offre avec ce disque la preuve la plus éclatante pour l’époque que l’on peut viser le sommet avec un rap technique et des bouts de phrases qui restent bien en tête.

Le côté name-dropping, que ce soit en matière de références pop-culture (cinéma notamment) ou même de ce que l’on appellerait aujourd’hui de geeks du rap avec des rimes qui en appellent à la connaissance des auditeurs, et qui sont autant de clins d’oeil. C’est aussi un des moyens de rendre ses pensées et sentiments directement accessibles à l’auditeur, par des punch plutôt que des longs sermons rébarbatifs. Et il faut ajouter à tout cela son talent en egotrip où il arrive à être à la fois impressionnant et très drôle en quelques phrases.

Pas besoin de transformer son album en compilation pour percer

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L’album Ready To Die ne compte que peu de featurings rap, en la personne de Method Man sur The What. Puff Daddy se contente de parler sur Suicidal Thoughts et Me and my bitch ; Lil Kim pousse simplement des gémissements sur l’interlude Fuck Me. Le reste, ce sont des chanteuses (Faith Evans, Diana King...), parfois non créditées d’ailleurs. Sachant que l’on parle tout de même du premier album d’un artiste, cela se pose là en terme de confiance en son propre talent. Bon par contre, de toute la liste, c’est peut-être le point qui a le moins influencé le rap US tel qu’on le connaît aujourd’hui, et c’est un peu dommage.

La revanche sur la vie

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L’une des postures qui est le plus devenue une banalité par la suite mais qui est pratiquement sublimée par Biggie sur cet album, c’est la position du rappeur millionnaire qui jette un coup d’oeil dans le rétro et prend un malin plaisir à opposer son ancien mode de vie avec l’actuel. Quitte d’ailleurs à forcer le trait. La fameuse rime sur les sardines au dîner, les anniversaires sans cadeau, etc, sa propre mère a déjà expliqué plusieurs fois que s’ils n’étaient pas riches, il n’étaient pas du tout à plaindre à ce point. Mais c’est aussi ce genre de phrases qui permettent à Wallace de mettre en avant sa réussite insolente en comparaison. Car dès qu’il s’agit de dépeindre à quel point son quotidien est un rêve éveillé, le rappeur se pose là et arrive à embarquer l’imaginaire de l’auditeur avec lui sans forcer. Le côté "motivation" que beaucoup de rappeurs revendiqueront par la suite, il l’avait déjà.

La tristesse derrière la réussite

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C’est le point le plus important. A travers la plupart des morceaux, le MC célèbre bien souvent son nouveau mode de vie et ses objectifs, l’argent, les femmes, la célébrité, bref tout ce qui va de pair avec le succès dans la vie d’un artiste de ce style. Cependant au détour de certaines rimes il n’hésite pas à laisser transparaître une certaine désillusion, voire pire : le doute profond, la conviction qu’il fait fausse route et qu’il le paiera peut-être un jour. Le point culminant étant bien sûr le morceau final Suicidal Thoughts où dans un appel nocturne à Diddy, le rappeur se lâche comme jamais et expose d’un coup toutes ses pensées les plus sombres. Dès son début de couplet il est glacial : "when I die, fuck it I wanna go to hell, cause I'm a piece of shit, it ain't hard to fuckin' tell" ("quand je mourrai, nique sa mère, je veux aller en enfer, parce que je suis une merde, c’est pas dur à dire putain"). La solitude, les pulsions morbides, la paranoïa aigüe, tout est là.

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Dans un autre morceau de l’album, Christopher Wallace se décrira comme un "black frank white" ce qui au-delà du jeu de mot sur les couleurs, fait appel au personnage de Frank White donc, le héros du film King of New York. C’est là, au détour de ce simple surnom, que l’on peut saisir toute la complexité du personnage de Biggie. Dans le film, un classique d’Abel Ferrara, Frank White connaît une ascension fulgurante en tant que criminel, ne respecte aucune règle et s’attire les foudres de certains ennemis ainsi que la police. Malgré sa victoire face à tous ses adversaires, il décède dans un taxi, seul en pleine circulation, des suites d’une blessure par balle.

Un King of New York, oui, mais tragique, sans couronne, entouré de cadavres et se sachant condamné. R.I.P Biggie.