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Manhunt : Unabomber, Dark, The End of the F***ing World… Les « productions originales » se succèdent sur Netflix ces dernières semaines et même les plus sérivores d'entre nous finissent par avoir du mal à suivre. Rien d'étonnant, donc, à ce qu'on n'ait pas remarqué au départ une nouveauté répondant au doux nom de La casa de papel. D'autant plus que cette « maison de papier », diffusée en cours d'année dernière sur la chaîne espagnole Antena 3 et distribuée depuis le 25 décembre par Netflix dans le reste du monde, n'a bénéficié d'aucune campagne de communication. Tout juste mentionnait-on son nom dans quelques recoins obscurs des communiqués de la firme de Los Gatos... Curieux que nous sommes, nous avons néanmoins décidé de la tester. Et la surprise fut bonne !
La casa de papel met en scène le périlleux casse de la Maison royale de la Monnaie d'Espagne par une bande de braqueurs. Plus de 2,4 milliards d'euros sont en jeu. Aux commandes, un truand surdoué surnommé « Le professeur », qui gère la mission à distance. À son service, huit malfaiteurs lourdement armés, tous recherchés par les plus grandes instances – et qui n'ont, en fin de compte, plus rien à perdre. Sous leur joug, 67 otages condamnés à être coopératifs pour garder la vie sauve. Jusqu'ici, rien qu'on n'ait pas déjà vu mille et une fois au cinéma. Mais, très rapidement, le scénario s'étoffe, les manœuvres se complexifient et les protagonistes gagnent en épaisseur, s'émancipant vite des stéréotypes qu'on leur a hâtivement attribués.
Première illustration dès le deuxième épisode où chaque otage se voit contraint d'enfiler le même costume que les criminels (une combinaison rouge écarlate et un masque à l'effigie de Salvador Dalí), rendant dès lors toute identification (et donc intervention) impossible. La police semble prise au piège, impuissante spectatrice du vol du siècle… du moins, pendant un moment. Car, vous vous en doutez bien, l'opération braquo-commando du « professeur » ne se passe pas exactement comme prévu. Et les retournements de situation (crédibles et intéressants, pas comme ceux des dernières saisons de The Walking Dead) sont légion, sans toutefois devenir excessifs.
Entre 24 heures chrono et Ocean's Eleven
Il faut dire que La casa de papel est rudement avantagée par son format télévisuel dont elle tire le maximum. Le showrunner Álex Pina (un nom à surveiller) exploite brillamment les treize épisodes de la saison, tous consacrés, presque en temps réel, à ce hold-up surréaliste. Seuls quelques flash-back détendent ponctuellement l'atmosphère et permettent de marquer une pause dans ce flot d'actions quasi ininterrompu. Un rythme qui n'est pas sans rappeler 24 heures chrono ou la dernière saison d'Orange Is the New Black. La cadence s'accentue, la tension monte sans cesse, poussant, inexorablement, au visionnage en rafale. Alors, certes, il serait sans doute exagéré de dire que la fiction révolutionne le genre. Mais ce n'est pas son intention et elle ne craint pas de se référer à ses aînés, usant avec habileté de clins d'œil aux grands classiques, de Steven Soderbergh (Ocean's Eleven) à Quentin Tarantino (Reservoir Dogs).
Mais si les inspirations sont principalement américaines, La casa de papel conserve son caractère proprement hispanique, ce dont on ne peut que se féliciter. Ce n'est pas tous les jours qu'il nous est offert de déguster une gourmandise du pays de Cervantès. Depuis le très soap Un, dos, tres, peu de programmes ont passé avec succès la frontière (récemment on peut citer Grand Hôtel et Velvet, qui laissent toutefois à désirer sur certains plans). Avec ce casse à la sauce Dalí, on peut donc découvrir ce que l'Espagne fait actuellement de mieux côté sériel.
Pour porter l'intrigue, Pedro Alonso et Úrsula Corbero, deux comédiens bien connus des férus de créations hispaniques (ils ont respectivement fait leurs armes sur Grand Hôtel et Physique ou chimie). Le premier incarne « Berlin », chef de bande aux multiples facettes, capable de jouer tour à tour les gentils et méchants flics pour mieux manipuler ses frères d'armes et/ou les otages. La seconde est « Tokio », la narratrice des événements, mais aussi l'élément perturbateur de l'intrigue. Le binôme d'acteurs fonctionne à merveille et devrait placer quelques projecteurs sur la scène cathodique espagnole, encore trop sous-estimée.
Bouche-à-oreille
Peu de critiques professionnels se sont penchés sur La casa de papel, mais le public, lui, ne s'y est pas trompé. Depuis début janvier, le bouche-à-oreille fonctionne à plein et les aficionados partagent régulièrement leur « épiphanie sérielle » sur les réseaux sociaux.
La Casa del Papel c’est un chef d’œuvre putain de bordel de merde presque envie de faire nuit blanche pour finir la série la
— RED ♕ (@FathKLS) 12 janvier 2018
la casa del papel c vraiment très lourd j’aime rarement autant une serie dès le premier épisode
— 2N (@E2TINE) 12 janvier 2018
Sur l'agrégateur Rotten Tomatoes, la série espagnole obtient à ce jour 97 % d'avis positifs du côté des spectateurs. Pour vous donner un ordre d'idée, même Game of Thrones, dont la popularité n'est plus à prouver, ne bénéficie « que » de 94 % d'opinions favorables du public (bon, évidemment, le bulldozer de HBO comptabilise infiniment plus de notes) ! Bref, si vous ne savez pas encore sur quelle nouveauté jeter votre dévolu ce mois-ci, foncez sur La casa de papel. Netflix a prévu de diffuser la suite dès le 6 avril…