APOCALYPSE GRECQUE DE BARUCH OU III BARUCH

Prologue

1 Récit ou révélation de Baruch au sujet des choses secrètes qu'il contempla sur l'ordre de Dieu. Bénis, ô Maître!1


2 Révélation de Baruch qui était sur le fleuve Gel, pleurant sur la captivité de Jérusalem,  lorsque Abimélech fut aussi préservé par la main de Dieu dans la propriété d'Agrippa; et il était assis près des belles portes, là où se trouvait le Saint des Saints.



Lamentation de Baruch. Apparition de l'ange.

I 1 Hélas! en ce moment, moi, Baruch, je pleurais dans mon coeur et j'éprouvais (de la tristesse) au sujet du peuple, et parce que le roi Nabuchodonosor avait été autorisé par Dieu à dévaster sa ville; je disais: "Pourquoi as-tu consumé ta vigne et en as-tu fait un désert? Pourquoi as-tu fait cela? Et pourquoi, Seigneur, ne nous as-tu pas infligé un autre châtiment, mais nous as-tu remis à des nations semblables pour qu'elles nous insultent en nous disant: "Où est leur Dieu?" " Et voici, pendant que je pleurais et parlais ainsi, je vis venir un ange du Seigneur, qui me dit: "Comprend, ô homme, homme de désirs, et ne te préoccupe pas tant du salut de Jérusalem, car ainsi parle le Seigneur Dieu, le Tout-Puissant. Car il m'a envoyé devant ta face pour t'annoncer et te montrer tous les (mystères) de Dieu. Car ta demande a été entendue devant lui et est parvenue aux oreilles du Seigneur Dieu." Et lorsqu'il m'eut dit cela, je gardais le silence. Et l'ange me dit: "Cesse d'irriter Dieu, et je te montrerai d'autres mystères plus grands que ceux-ci." Et moi, Baruch, je dis: "Aussi vrai que le Seigneur Dieu est vivant, si tu me le montres et que j'entende de toi une parole, je ne continuerai certes pas à parler davantage. Dieu au jour du Jugement m'ajoutera un jugement, si je parle désormais." Et l'ange des Puissances me dit: "Viens, et je te montrerai les mystères de Dieu."



Premier Ciel

II Et, m'ayant pris, il me conduisit à l'endroit où la voûte du ciel est solidement fixée et où se trouve un fleuve, que personne ne peut traverser, pas plus qu'une brise étrangère (à ces régions) d'entre toutes celles qu'a établies Dieu. Et, m'ayant pris, il me conduisit au premier ciel et me montra une porte d'une immense taille. Et il me dit: "Franchissons-la." Et nous entrâmes comme portés par des ailes, parcourant une distance d'environ trente jours de voyage. Et il me montra à l'intérieur du ciel une plaine; et il y avait, demeurant là, des hommes avec des faces de boeufs, des cornes de cerfs, des pieds de chèvres, et des hanches de moutons. Et moi, Baruch, j'interrogeai l'ange: "Fais-moi connaître, je t'en prie, la profondeur du ciel dans lequel nous avons fait route, ou son étendue ou quelle est cette plaine, afin que moi aussi je le fasse connaître aux fils des hommes." Et l'ange, dont le nom est Phamaël, me dit :"Cette porte que tu vois est celle du ciel, et aussi considérable qu'est la distance de la terre au ciel est son épaisseur, et aussi considérable la longueur de la plaine que tu as vue." Et de nouveau, l'ange des Puissances me dit: "Viens, et je te montrerai de plus grands mystères." Mais je dis: "Je t'en prie, explique-moi qui sont ces hommes." Et il me dit: "Ceux sont qui ont bâti la tour du combat contre Dieu, et le Seigneur les a dispersés."




Deuxième Ciel

III Et, m'ayant pris, l'ange du Seigneur me conduisit au deuxième ciel. Et il me montra, là aussi, une porte semblable à la première. Et il me dit: "Franchissons-la." Et nous entrâmes portés par des ailes sur une distance d'environ soixante jours de voyage. Et il me montra, là aussi, une plaine, et elle était remplie d'hommes. Leur aspect était semblable à celui de chiens, et leurs pieds à celui de cerfs. Et j'interrogeais l'ange: "Je t'en prie, Seigneur, dis-moi qui sont ceux-ci?" Et il dit: "Ce sont ceux qui ont donné le conseil de faire la tour. En effet, ceux que tu vois poussèrent des foules d'hommes et de femmes à fabriquer des briques. Dans leur nombre, une femme qui fabriquait des briques au moment d'enfanter ne fut pas autorisée à s'interrompre, et elle accoucha pendant qu'elle fabriquait des briques. Et portant son enfant dans ses langes, elle fabriquait des briques. Et le Seigneur leur apparut et confondit leurs langages alors que la tour qu'ils avaient bâtie était haute de quatre cent soixante-trois coudées. Et prenant une tarière, ils s'efforçaient de percer le ciel, en disant: "Voyons si le ciel est fait de terre cuite, d'airain ou de fer." Dieu vit cela et ne les laissa pas faire, mais il les frappa en leur ôtant la vue et en altérant leur langue, et il les fit tels que tu les vois."


Troisième Ciel

IV Et moi, Baruch, je dis: "Vois, Seigneur, tu m'as montré de grandes et merveilleuses choses; et maintenant montre-moi toutes choses pour l'amour du Seigneur." Et l'ange me dit: "Viens, avançons." (Et j'avançais) avec l'ange à partir de cet endroit; la distance était d'environ cent quatre-vingt-cinq jours de voyage. Et il me montra une plaine et un serpent dont l'aspect était celui d'une roue. Et il me montra l'Hadès; son aspect était ténébreux et souillé. Et je dis: "Qui est ce serpent? Et qui est ce monstre qui l'entoure?" Et l'ange dit: "Le serpent est celui qui mange le corps de ceux qui ont passé leur vie dans la malice, et il s'en nourrit. Quant à celui-ci, c'est l'Hadès, qui lui est presque semblable, en ceci qu'il boit aussi une coudée environ à la mer, sans qu'elle en soit en rien diminuée." Baruch dit: "comment cela?" Et l'ange dit: "Ecoute! Le Seigneur Dieu a fait trois cent soixante fleuves dont les plus importants de tous sont l'Alphias, l'Abyros et le Gérikos; et c'est grâce à eux que la mer ne diminue pas." Et moi, je dis: "Je t'en  prie, montre-moi l'arbre qui a égaré Adam." Et l'ange dit: "C'est la vigne que l'ange Samaël a plantée - ce dont le Seigneur Dieu fut irrité -; et il le maudit, lui et sa plante. Pour la même raison, il ne permit pas à Adam d'y toucher. C'est aussi la raison pour laquelle le diable, saisit de jalousie, le séduisit par sa vigne." Et moi, Barurch, je dis: "Puisque la vigne a été la cause d'un si grand mal, et qu'elle a été responsable de la malédiction divine et de la perdition du premier homme, pourquoi est-elle a présent si utile?" Et l'ange dit: "Ta question est bonne. Quand Dieu provoqua le déluge sur terre et détruisit toute chair et les quatre cent neuf mille géants, et que l'eau s'éleva de quinze coudées au-dessus des plus hautes montagnes, l'eau entra dans le paradis et détruisit toutes les fleurs. Mais elle élimina complètement le cep de la vigne et le jeta dehors. Et, quand la terre apparut hors de l'eau et que Noé sortit de l'arche, il se mit à planter quelques-unes des plantes qu'il avait trouvées. Mais il trouva aussi le cep, et, l'ayant pris, il se dit en lui-même: "Qu'est-ce donc?" Et moi, je vins et je lui racontai l'histoire de cette plante. Et il dit: "Le planterai-je aussi ou quoi? Puisque Adam a péri à cause de lui, je ne voudrais pas éprouver moi-même la colère de Dieu, à cause de lui." Et, tout en disant cela, il pria Dieu de lui révéler ce qu'il devait faire de cette plante. Et, ayant prolongé sa prière durant quarante jours avec beaucoup de supplications et de larmes, il dit: "Seigneur, je te prie de me révéler ce que je dois faire de cette plante." Or Dieu envoya l'ange Sarasael, et il lui dit: "Lève-toi, Noé, plante le cep, car ainsi parle le Seigneur: son amertume se changera en douceur, et sa malédiction deviendra bénédiction, et ce qui provient de deviendra le sang de Dieu; et si par lui la race des hommes a encouru la malédiction, de même, au contraire, grâce à Jésus-Christ, l'Emmanuel, ils recevront l'appel d'en haut, et l'accès au paradis." Sache donc,ô Baruch, que, de même qu'Adam, à cause de cette plante, a encouru la condamnation et a été dépouillé de la gloire de Dieu, de même aussi les hommes d'aujourd'hui qui boivent de manière insatiable le vin qui en provient commettent une transgression pire que celle d'Adam, s'éloignent de la  gloire de Dieu, et se livrent eux-mêmes au feu éternel. En effet, rien de bon ne vient de lui. Car voici ce que font ceux qui en boicent à l'excès: un frère n'a pas pitié de son frère, ni un père de son fils, ni les enfants de leurs parents, mais boire du bin entraîne tous les maux: meurtres, adultères, fornications, faux serments, vols et autres forfaits qui leur sont semblables. Et rien de bon ne peut être accompli par  lui."


V Et moi, Baruch, je dis à l'ange: "Je veux te poser une question, Seigneur:  puisque tu m'as dit que le serpent boit une coudée de la mer, dis-moi aussi quelle est la grandeur de son ventre." Et l'ange dit: "Son ventre, c'est l'Hadès. Et aussi loin qu'un plomb est lancé par trois cent hommes, aussi grand est son ventre. Viens donc, pour que je te montre des prodiges  plus grands que ceux-ci."


VI Et, m'ayant pris, il me conduisit là où le soleil se lève. Et il me montra un quadrige qui lançait des flammes. Et sur le char un homme était assis portant une couronne de feu. Le char était tiré par quarante anges. Et voici, un oiseau courait devant le soleil; (il était grand) comme neuf montagnes. Et je dis à l'ange: "Quel est cet oiseau?" Et il me dit: "C'est le gardien de la terre". Et je dis: "Seigneur, comment est-il le gardien de la terre? Apprend-le moi." Et l'ange me dit: "Cet oiseau court auprès du soleil, et en déployant ses ailes il intercepte ses rayons à la forme de feu. Car s'il ne les interceptait pas, la race des hommes ne survivrait pas, ni aucun autre vivant. Mais Dieu a placé cet oiseau à ce poste." Et il étendit ses ailes, et je vis sur son aile droite des lettres gigantesques, aussi grandes que le sol d'une aire à battre, d'une capacité d'environ quatre mille boisseaux. Et les lettres étaient en or. Et l'ange me dit: "Lis-les." Et je lus. Et voici ce qu'elles signifiaient: "Ni terre ni ciel ne me donnent le jour, mais ce sont des ailes de feu qui me le donnent." Et je dis: "Seigneur, quel est cet oiseau et quel est son nom?" Et l'ange me dit: "Phénix est le nom dont on l'appelle. - Et que mange-t'il?" Et il me dit: "La manne du ciel et la rosée de la terre." Et je dis: "Fait-il un excrément?" Et il me dit: "Il fait un ver, et l'excrément du ver est la cannelle, dont se servent rois et princes. Mais attends et tu verras la gloire de Dieu." Et pendant qu'il conversait, il y eut un grondement tonitruant semblable au fracas du tonnerre, et l'endroit où nous nous tenions fut ébranlé. Et j'interrogeai l'ange: "Mon Seigneur, quel est ce bruit?" Et l'ange me dit: "C'est le moment où les anges ouvrent les trois cent soixante-cinq portes du ciel, et où la lumière est séparée d'avec les ténèbres." Vint alors une voix qui disait: "Dispensateur de la lumière, donne à l'univers la lumière!" Et, quand j'entendis le bruit retentissant de l'oiseau, je dis: "Seigneur, quel est ce bruit retentissant?" Et il me dit: "C'est ce qui réveille les coqs de la terre; comme les bouches humaines, le coq aussi communique avec les habitants de la terre dans l'idiome qui lui est propre. Le soleil, en effet, est préparé par les anges, et le coq chante."


VII Et moi je dis: "Et où le soleil commence-t'il son travail après le chant du coq?" Et l'ange me dit: "Ecoute, Baruch. Tout ce que je t'ai montré se trouve dans le premier et le deuxième ciel; c'est dans le troisième ciel que le soleil circule et dispense la lumière à l'univers. Mais attends et tu verras la gloire de Dieu." Et, pendant que je conversais avec lui, je vis l'oiseau; il apparut en avant, et croissait peu à peu et prit sa pleine taille. Et, derrière lui, il y avait le soleil qui brillait et avec lui les anges qui le pportaient; il avait une couronne sur la tête. Il nous était impossible de considérer ce spectacle en face en conservant la vue. Et en même temps que le soleil brillait, le phénix déployait ses ailes. Mais moi, à la vue d'une telle gloire, je fus frappé d'une grande crainte, je pris la fuite et je me cachai sous les ailes de l'ange. Et l'ange me dit: "Ne crains pas, Baruch, mais attends et tu verras aussi leur coucher."


VIII Et, m'ayant pris, il me conduisit vers l'occident. Et, quand vint l'heure du couchant, je vis de nouveau l'oiseau venir en face et le soleil venir avec les anges. Et, en même temps que sa venue, je vis les anges qui ôtèrent la couronne de sa tête. Quand à l'oiseau, il demeurait épuisé et refermait ses ailes. Et moi, à ce spectacle, je dis: "Seigneur, pourquoi ont-ils ôté la couronne de la tête du soleil, et pourquoi l'oiseau est-il si épuisé?" Et l'ange me dit: "La couronne du soleil, quand il a achevé sa journée, quatre anges la prennent et l'emportent vers le ciel, et la renouvellent parce qu'elle est souillée ainsi que ses rayons au contact de la terre. Et, du reste, c'est chaque jour qu'elle est ainsi renouvellée." Et moi, Baruch, je dis: "Et pourquoi, Seigneur, ses rayons sont-ils souillés au contact de la terre?" Et l'ange me dit: "Parce qu'ils voient les dérèglements et les injustices des hommes, à savoir fornications, adultères, vols, rapines, idolâtries, ivrogneries, meurtres, querelles, rivalités, médisances, murmures, calomnies, divinations, et autres forfaits qui ne plaisent pas à Dieu. C'est pour cette raison qu'elle est souillée et pour cela qu'elle est renouvelée. Quant à l'oiseau, voici la cause de son épuisement: c'est parce qu'il retient les rayons du soleil, à travers le feu et la chaleur quotidienne, c'est à cause de cela qu'il est épuisé. Car, si ses ailes, comme nous l'avons dit plus haut, ne voilaient pas les rayons du soleil, aucune créature ne survivrait."


IX Et quand ceuxi-ci se furent retirés, la nuit tomba, accompagnée en même temps de la lune et des étoiles. Et moi, Baruch, je dis: "Seigneur, montre-moi aussi celle-ci, je t'en prie. Comment se met-elle en route? Où s'en va-t-elle? Et quelle est la forme de sa trajectoire?" Et l'ange dit: "Attends et tu la verras dans peu de temps." Et le lendemain, je la vis aussi sous la forme d'une femme et assise sur un char rapide.    Et devant elle, il y avait des boeufs et, dans le char, des agneaux, et de même une multitude d'anges. Et je dis: "Seigneur, qui sont les boeufs et les agneaux?" Et il me dit: "Ce sont  eux aussi des anges." Et je l'interrogeai de nouveau: "Pourquoi se fait-il que tantôt elle croît, tantôt elle décroît? - Ecoute, Baruch: celle quue tu vois a été dessinée par Dieu d'une beauté sans pareille. Et lors de la désobéissance du premier Adam, elle s'attache à Samaël quand il prit le serpent pour habit. Non seulement elle ne se cacha pas, mais elle se fit plus grande; et Dieu s'irrita contre elle et la comprima et abrégea ses jours." Et je dis: "Et pourquoi ne brille-elle pas tout le temps mais seulement la nuit?" Et l'ange dit: "Ecoute, de même qu'en présence d'un roi les serviteurs ne peuvent parler librement, de même la lune et les étoiles ne peuvent briller en présence du soleil; les étoiles en effet sont toujours suspendues, mais elles sont dissipées par le soleil, et la lune, tout en étant saine et sauve, est consumée par la chaleur du soleil."


Quatrième ciel


X  Et quand j'eus appris toutes ces choses de l'archange, il me prit et me conduisit dans un (quatrième ciel). Et je vis une plaine toute unie, et en son milieu un lac d'eau. Et il y avait là des mutlitudes d'oiseaux de toute espèce, mais qui n'étaient pas semblables à ceux d'ici-bas. Mais je vis la grue de la taille de grands boeufs. Et tous les oiseaux étaient d'une grandeur supérieure à celle des oiseaux de la terre. Et j'interrogeai l'ange: "Quelle est cette plaine, quel est le lac et quelle est cette multitude d'oiseaux qui l'entoure?" Et l'ange dit: "Ecoute, Baruch! La plaine qui contient le lac et d'autres merveilles est l'endroit où viennent les âmes des justes quand elles se rassemblent, groupées en de multiples choeurs. Quant à l'eau, c'est celle que les nuages reçoivent pour la déverser sur la terre et pour faire croître les fruits." Et je dis de nouveau à l'ange du Seigneur: "Et les oiseaux?" Et il me dit: "Ce sont ceux qui constamment chantent le Seigneur." Et moi, Baruch, je dis: "Seigneur, et comment se fait-il que les hommes disent que c'est de la mer que provient l'eau de pluie?" Et l'ange dit: "L'eau de pluie qui provient de la mer et des eaux terrestres est aussi celle-ci. Mais celle qui fait pousser les fruits ne provient (que de) celle-ci. Sache donc désormais que ce qu'on appelle la rosée du ciel provient de cette source."


Cinquième ciel


XI Et m'ayant pris de ce lieu, l'ange me conduisit au cinquième ciel. Et la porte était close. Et je dis: "Seigneur, cette porte ne s'ouvre-t-elle pas pour que nous entrions?" Et l'ange me dit: "Nous ne pouvons entrer jusqu'à ce que vienne Michel, le gardien des clefs du royaume des cieux. Mais patiente, et tu verras la gloire de Dieu." Et il y eut un grand bruit, comme le tonnerre. Et je dis: "Seigneur, quel est ce bruit?" Et il me dit: "C'est précisément l'archistratège Michel qui descend pour recevoir les prières des hommes." Et voici, vint une voix: "Que les portes s'ouvrent!" Et ils ouvrirent, et il y eut un grincement semblable au tonnerre. Et Michel vint, et l'ange qui était avec moi s'avança vers lui, et se prosterna devant lui et dit: "Je te salue, mon archistratège et celui de toute notre légion." Et l'archistratège michel dit: "Je te salue aussi, notre frère, toi qui es l'interprète des révélations auprès de ceux qui passent dans la vertu toute leur vie." Et, après s'être ainsi salués l'un et l'autre, ils se tinrent debout. Et je vis l'archistratège Michel saisir une coupe de très grande taille. Sa profondeur égalait la distance du ciel à la terre, et sa largeur celle du nord au sud. Et je dis: "Seigneur, quel est l'objet que saisit l'archange Michel?" Et il me dit: "C'est le réceptacle où vont les mérites des justes et toutes les bonnes oeuvres qu'ils accomplissent; il sert à les transporter devant le Dieu céleste."


XII Et pendant que je conversais avec lui, voici que des anges vinrent qui portaient des corbeilles pleines de fleurs; et ils les donnèrent à Michel; Et j'interrogeai l'ange: "Seigneur, qui sont-ils et qu'apportent-ils?" Et il me dit: "Ce sont les anges préposés aux justes." Et l'archange ayant pris les corbeilles, les jeta dans la coupe. Et l'ange me dit: "Ces fleurs sont les mérites des justes." Et je vis d'autres anges portant des corbeilles ni vides ni pleines. Et ils venaient affligés, et ils n'osaient pas s'approcher, parce qu'il n'avait pas la totalité des récompenses. Et Michel cria et dit: "Venez, vous aussi, anges, apportez ce que vous avez obtenu." Et Michel fut excessivement attristé ainsi que l'ange qui m'accompagnait, parce qu'ils n'avaient pas rempli la coupe.


XIII Et puis vinrent de même d'autres anges pleurant et se lamentant et disant avec crainte: "Vois, comme nous sommes devenus assombris, Seigneur, car nous avons été livrés à des hommes méchants, et nous désirons ne plus être attachés à eux." Et Michel dit: "Vous ne pouvez vous éloigner d'eux de peur que l'Ennemi ne l'emporte définitivement. Mais dites-moi ce que vous demandez." Et ils dirent: "Nous te prions, Michel, notre archistratège, de nous détacher d'eux, car nous ne pouvons demeurer avec des hommes impies et insensés, car il n'y a en eux aucun bien mais toute espèce d'injustice et d'iniquité. Nous ne les avons pas vus en effet entrer jamais dans une assemblée, ni parmi des pères spirituels, ni dans aucune bonne action. Mais là où règne le meurtre, là on les trouve, au milieu, et là où il y a des fornications, adultères, vols, médisances, faux serments, jalousies, ivrogneries, querelles, envie, murmures, calomnies, idolâtrie, divination et d'autres méfaits pareils à ceux-là, là sont les artisans de tels forfaits et d'autres pires. C'est pourquoi nous te prions de nous détacher d'eux." Et Michel dit aux anges: "Patientez jusqu'à ce que j'apprenne du Seigneur ce qui doit arriver."


XIV Et à cette heure-même, Michel s'éloigna et les portes furent fermées. Et il y eut un bruit semblable au tonnerre. Et j'interrogeai l'ange: "Quel est ce bruit?" Et il me dit: "A présent, Michel porte les mérites des hommes à Dieu."


XV Et à cette heure-même, Michel descendit et la porte fut ouverte; et il apporta de l'huile. Et il remplit d'huile les corbeilles des anges qui les avaient apportées pleines en disant: "Emportez, récompensez au centuple nos amis et ceux qui ont laborieusement accompli les bonnes oeuvres. Car ceux qui ont semé dans la vertu, récoltent aussi dans la vertu." Et il dit aussi à ceux qui avaient apportés des corbeilles à moitié vides: "Venez, vous aussi, recevez le salaire correspondant à ce que vous avez apporté, et remetter-le aux fils des hommes." Il dit ensuite à ceux qui avaient apporté des corbeilles pleines comme à ceux qui les avaient apportées à moitié vides: "Allez et bénissez nos amis, et dites-leur: "Ainsi parle le Seigneur: vous êtes fidèles en peu de choses, il vous sera beaucoup confié. Entrez dans la joie de notre Seigneur.""


XVI Et s'étant retourné, il dit aussi à ceux qui n'avaient rien apporté: "Ainsi parle le Seigneur: ne soyez pas sombres et ne pleurez pas et n'abandonnez pas les fils des hommes. Mais puisqu'ils m'ont irrité par leurs oeuvres, allez, rendez-les jaloux et irritez-les et aigrissez-les contre une nation qui n'en est pas une, une nation sans intelligence. De plus, outre cela, envoyez-leur des chenilles et des sauterelles, de la nielle et des criquets, de la grêle avec des éclairs et avec colère. Et châtiez-les par le glaive et par la mort, et leurs enfants par les démons. Car ils n'ont pas écouté ma voix et n'ont pas observé ni mis en pratique mes commandements, mais ils ont méprisé mes commandements et mes assemblées, et ils ont été violents à l'égard des prêtres qui leur annonçaient mes paroles."


Retour de Baruch sur terre


XVII Et sur ce discours, la porte fit fermée, et nous nous retirâmes. Et m'ayant pris, l'ange me ramena à mon point de départ. Et revenu à moi, je rendais gloire à Dieu qui m'avait jugé digne d'un tel honneur. Vous aussi, mes frères, qui avez reçu une telle révélation, glorifiez vous aussi Dieu, afin que lui aussi vous glorifie maintenant, et toujours et dans les siècles des siècles. Amen.